CRDA Inspirateur des centres du patrimoine et de la mémoire arménienne

Ne pouvant être archives d’Etat, le CRDA est par essence et en vertu d’une démarche volontaire le réceptacle de toutes les mémoires vives comme mortes comprenant tout ce qui pouvait systématiquement être collecté auprès des Arméniens de la diaspora.

En Europe, dès sa création en 1976, le CRDA recourt au concept de la mémoire et l’utilise dans ses premiers écrits publiés par ses cahiers Cultures arméniennes.

C’est une première mondiale. En effet, ce concept est implicite dans son intitulé et devient un concept directeur et opératoire exclusif et fondateur. Les autres organisations d’origine historique ont été fondées sur le concept de nation, de «Cause arménienne», de «Question arménienne», du combat politique de manière générale.

Donc, le CRDA, tout en ayant ses points de vue politiques, se spécialise sur les problèmes de la mémoire inconnue, occultée ou refoulée, voire réprimée. Il va dès lors non seulement discourir, mais également collecter les traces écrites et orales sur le sujet, et même commencer à produire. A la même époque, aux Etats-Unis, Ruth Tomasian avait commencé en 1975 la collecte de photographies de Save Armenian Archives. En matière photographique, les dates coïncident, car le CRDA avait déjà un goût très fort pour la photographie et commencé sa collecte.

L’Armenian Film Fondation de Los Angeles de J. Michael Hagopian date de 1979. Ses productions sont essentiellement basées sur les archives mais le ton est celui du rappel et de la convocation des mémoires officielles mais aussi privées.

Avant ces dates, seuls des ouvrages en arménien de souvenirs, de témoignages, de récits et de descriptions portant sur une ville ou une région avaient été réalisés par les survivants réunis autour d’une revue ou au sein d’une union compatriotique d’origine. La presse arménienne se faisait quant à elle l’écho de souvenirs de personnages importants.

En Arménie soviétique des quartiers ou villes périphériques d’Erevan sont baptisés en souvenir des villes de «l’Arménie occidentale» d’où les réfugiés étaient originaires. Le mémorial du génocide de Dzidzernagapert, près d’Erevan, est construit entre 1965 et 1968. Mais nous sommes là dans les symboles matériels. Il existe, bien sûr, les Archives nationales d’Etat, et toutes les autres institutions vouées à la culture, qui possèdent nécessairement une partie de cette mémoire collective à côté des archives proprement dites. D’ailleurs les archives écrites, enregistrées et filmées font partie de cette mémoire nationale.

Mais ce qui commence à être pris en compte, pour la première fois par le CRDA, c’est le récit des plus humbles, de tout arménien, sans égard pour ce qu’il a vécu, le rôle qu’il a joué et ce qu’il représente au sein de la société et de sa communauté. C’est la mémoire de n’importe qui, à l’état brut, non apprêtée, jaillissant de la seule mémoire émotive et de la parole spontanée. Cette mémoire est non construite et ne suit pas une doxa militante : elle relève les moindres détails, erreurs éventuelles et hésitations, elle respecte le locuteur comme porteur d’une parcelle du gisement énorme de ce qui a été vécu par chacun.

Ne pouvant être archives d’Etat, le CRDA est par essence et en vertu d’une démarche volontaire le réceptacle de toutes les mémoires vives comme mortes comprenant tout ce qui pouvait systématiquement être collecté auprès des Arméniens de la diaspora.

Le CRDA a été le pionnier du concept de la mémoire arménienne en France, voire dans le monde, en tant qu’une préoccupation nouvelle, conviviale, ouverte sur tous les publics, transcendant toutes les divisions et intéressant tous les publics.

L’expérience a prouvé que ce choix stratégique était source non seulement de fidélité, mais surtout et également créateur et organisateur d’identité et facteur d’échanges intergénérationnels et interculturels.

Le CRDA donnera ainsi naissance à Paris en 1983 au premier centre de documentation et à la première médiathèque sur le sujet, générant expositions et animations, à l’instar d’un musée vivant se situant résolument dans le partage.

Le CRDA fera discrètement et efficacement école.

En 1980, à Décines, fut créé sur le modèle du CRDA le CEDIA (Centre d’étude documentaire et d’information d’Arménie). En 1997 à Marseille fut créée l’association ARAM (Association pour la recherche et l’archivage de la mémoire arménienne). En 2005, après que le CRDA a émis auprès d’un élu arménien l’intention du CRDA d’ouvrir une succursale à Valence, fut construit le Centre du Patrimoine arménien de Valence. En 2013, à Décines, sera inauguré le Centre National de la Mémoire arménienne.

Le concept a fait des émules, ainsi que les expositions et les colloques à thème (architecture, sociologie, linguistique, cinéma, dialogue avec d’autres communautés) que le CRDA a inaugurés en France dès 1983.


Le CRDA a été le pionnier du concept de la mémoire arménienne en France, voire dans le monde, en tant qu’une préoccupation nouvelle, conviviale, ouverte sur tous les publics, transcendant toutes les divisions et intéressant tous les publics.